La Mappemonde de Hereford, réalisée à la fin du XIIIᵉ siècle, est l’une des cartes les plus fascinantes et précieuses du Moyen-Âge. Conservée dans la cathédrale de Hereford, elle est inscrite au Registre Mémoire du Monde de l’UNESCO, et constitue un témoignage unique de la perception médiévale du monde, mêlant géographie, théologie et mythologie. Dans cet article, nous explorerons l’histoire de son créateur et les particularités de cette œuvre monumentale, ainsi que les innombrables détails qui en font une carte ancienne du monde si exceptionnelle.
Richard de Haldingham : le génie derrière la Mappemonde de Hereford
Richard de Haldingham, également connu sous le nom de Richard de Bello ou Richard de Lafford, est désigné comme le créateur de la Mappemonde de Hereford. Né vers 1245, il aurait été un clerc rattaché à la cathédrale de Lincoln avant de contribuer à la création de cette œuvre exceptionnelle à Hereford. Une inscription sur la carte témoigne de son rôle :
« Que tous ceux qui entendront cette histoire, qui la liront ou la verront prient Jésus, dans sa divinité, pour le salut de Richard de Haldingham et Lafford, qui la conçut et la réalisa. »
Son œuvre ne se limite pas à une simple carte géographique ; elle reflète une vision spirituelle du monde, fusionnant des récits bibliques, des mythes antiques et des connaissances géographiques médiévales. L’orientation de la carte, avec l’est en haut, place Jérusalem en son centre, une configuration symbolique commune dans les mappa mundi chrétiennes de l’époque.
La Mappemonde de Hereford : lecture et réalisation
Cette très ancienne mappemonde est réalisée sur du vélin, un parchemin précieux issu de peau de veau, et mesure 158 cm de haut pour 133 cm de large. Elle est la plus grande mappa mundi, carte du monde réalisée en Europe au Moyen-Âge, encore intacte depuis la destruction de la carte d’Ebstorf durant la Seconde Guerre mondiale. Elle a probablement été créée à des fins éducatives et spirituelles, afin d’instruire les fidèles sur la géographie sacrée et les mystères du monde.
La carte suit le modèle classique des cartes en « T » (Orbis Terrarum), où le monde est divisé en trois continents :
• L’Asie, située en haut, abrite le paradis terrestre avec Adam, Ève et le serpent.
• L’Europe, à gauche, regroupe les principales villes médiévales.
• L’Afrique, à droite, est ornée de créatures mythiques.
Au centre de la carte se trouve Jérusalem, symbole du cœur spirituel du monde chrétien. Les marges de la carte, quant à elles, sont peuplées de monstres et de légendes, reflétant les limites du monde connu et l’imaginaire médiéval.
Sa réalisation a mobilisé des techniques avancées pour l’époque : l’utilisation d’un compas pour tracer les cercles, des pigments naturels pour les enluminures et des annotations en latin, parfois en normand, pour expliquer chaque lieu ou scène. L’organisation minutieuse de la carte montre une combinaison de rigueur scientifique et de symbolisme religieux.
Les détails captivants de la Mappemonde de Hereford
La richesse de cette carte ancienne du monde réside dans ses nombreux détails, qui témoignent de la vision du monde au Moyen Âge.
L’iconographie religieuse
La carte est avant tout un outil théologique. Jérusalem est représentée avec une scène de crucifixion, tandis que le Paradis terrestre se situe à son sommet, entouré de murs et de portes. Les récits bibliques sont omniprésents :
• Sodome et Gomorrhe sombrent dans des eaux enflammées.
• L’arche de Noé est visible, avec des personnages apparaissant à travers ses fenêtres.
• La traversée de la mer Rouge par Moïse est également représentée.
Les monstres et créatures légendaires
Les marges de la carte foisonnent de créatures mythiques :
• Des cynocéphales (hommes à tête de chien), des sciopodes (hommes à une jambe géante) et des dragons peuplent les terres inconnues.
• Le labyrinthe de Dédale, en Crète, est dessiné avec une perforation centrale, témoignant de l’usage d’un compas.
Les monuments symboliques
Babylone est représentée avec la tour de Babel, symbole de l’ambition humaine. Jérusalem est également mise en avant, avec des détails précis de ses édifices religieux. Rome est identifiable, tout comme Paris et d’autres villes importantes de l’Europe médiévale.
Conclusion : la Mappemonde de Hereford, œuvre intemporelle de la cartographie médiévale
La Mappemonde de Hereford est un véritable chef-d’œuvre, incarnant la fusion de la foi, du savoir et de l’art. Son importance dépasse largement son époque, nous offrant aujourd’hui une fenêtre sur la manière dont le Moyen Âge percevait le monde, ses mystères et sa structure divine.
Visiter la cathédrale de Hereford pour admirer cette mappemonde ancienne permet de plonger dans un univers où la science et la théologie cohabitaient harmonieusement. Une invitation à explorer non seulement une carte, mais un univers de croyances et de symboles qui continuent de captiver les historiens, les amateurs de cartes anciennes et les curieux.
En somme, cette œuvre exceptionnelle est bien plus qu’une simple représentation géographique : c’est une réflexion sur l’humanité, sa quête de sens et son désir de comprendre le monde à travers le prisme de la foi et de la science.